La fine pluie qui tombait sur Seattle rafraîchissait l’air de la ville tout autant que le vent marin qui soufflait légèrement. Debout à l’extérieur du bâtiment, Lorenzo frissonnait légèrement, peu habitué à ce climat froid et humide qui régnait dans l’état de Washington. Il n’était ici que depuis une semaine à peine, après avoir quitté sa Californie natale, et il faut bien avouer que cela faisait un choc climatique tout de même. Sa blouse de protection jaune trahissait son attente d’une ambulance, annoncée il y avait maintenant cinq minutes. Pour sa première garde au SGMH, il était le responsable de la mine, le docteur Hunt étant de repos. Il avait à peine eu le temps de se présenter au chef ce matin et d’enfiler sa blouse qu’il avait déjà dû intervenir auprès de deux patients. Et voilà le 3ème qui n’allait pas tarder à arriver.

Les sirènes de l’ambulance se firent enfin entendre au même moment où l’italien fut rejoint par sa résidente, une certaine Jessica Hall qui lui adressa un grand sourire en lui demandant ce qu’ils avaient. Le grand brun n’eut pas à lui répondre car les portes de l’ambulancier s’ouvrirent à la volée sur l’ambulancière et leur patient.

- David Lyker, 37 ans, corps étranger métallique dans le torse, il a y de grandes chances que des organes vitaux soient touchés.

Et quel corps étranger métallique ! Le patient de Lorenzo n’avait pas moins qu’un javelot qui le traversé de part en part du torse, moins d’une dizaine de centimètres en dessous du cœur.

- Ouais, les poumons sans aucun doute. On le mets dans la salle de trauma 2, Hall, faites bipper un chirurgien thoracique, on va en avoir plus que besoin.

Commença à répondre l’italien en prenant rapidement les choses en main comme la plupart du temps. Le patient encore conscient n’était pas pour autant très lucide, délirant à moitié sans doute à cause de la douleur et de la morphine mélangées. Arrivant dans la salle de traumatologie, Lorenzo, aidé de l’ambulancier, transféra l’homme sur le lit d’hôpital et commença aussitôt à s’activer avec l’aide de deux infirmières pour stabiliser le plus possible le patient. Dès que le cardiologue serait là, il faudrait qu’ils montent rapidement aux blocs pour retirer ce javelot.

Alors qu’il s’activait encore pour stabiliser le patient, Lorenzo entendit la porte s’ouvrir et sa résidente annoncer que le cardiologue était là.

- Parfait ! Docteur Donovan, traumatologue et venant tout juste d’arriver à l’hôpital, enchanté.

Se présenta-t-il rapidement à son nouveau collègue, comme il l’avait déjà pour un neurologue pour le patient précédent, sans lever les yeux vers le deuxième chirurgien, occupé à stabiliser tant bien que mal le patient.

- Le patient s’appelle David Lyker, a 37 ans et le reste, je pense que vous le devinez rapidement à la vue du javelot dans son torse. On a réussi à le stabiliser et apparemment, le bloc 2 est libre. Vous êtes….

L’italien se stoppa net dans ses explications quand il releva enfin la tête pour voir le cardiologue. Non, c’était impossible ! Teddy ?! Ici ?! Mais…. Il la croyait en Irak ! Qu’est-ce que c’était que cette histoire ?

L’espace d’un instant, le monde semblait avoir disparu entre Lorenzo et Teddy. Ils se fixaient tous les deux, complètement incrédules de se retrouver face à face alors que rien ne les prédestinaient à se retrouver ici. Teddy devait être en Irak et Lorenzo à Los Angeles… Et finalement, ils retrouvaient à Seattle. Cette bulle éclata tout de même quand la blonde se força à agir et s’approcha du patient qu’elle ausculta rapidement avant d’annoncer qu’ils montaient au bloc. L’italien l’imita et revient au présent et à la situation actuelle.

Face à son ancienne titulaire mais également amante, le grand brun l’aida à pousser le brancard le long du couloir jusqu’aux ascenseurs. Il ne tourna qu’une seule fois la tête vers elle, comme pour s’assurer qu’il s’agissait bien d’elle mais c’était parfaitement inutile. Elle s’était présentée, elle avait confirmée qu’elle était bien Teddy ais de son côté, elle était concentrée sur le patient et ses constantes. Dans l’ascenseur, l’italien tenta une nouvelle fois de la regarder, espérant sans doute capter son regard sans vraiment savoir pourquoi. Mais il remarqua rapidement qu’elle semblait tout faire pour ne pas le regarder. Baissant la tête, Lorenzo commença à se dire qu’elle ne l’avait sans doute pas prévenue de son retour d’Irak parce qu’elle ne voulait plus avoir à faire à lui dans sa vie.

Ne cherchant plus à voir si son ancienne amante lui accordait un peu d’attention, il se reconcentra sur son patient, ses constantes et son état de conscience. Les portes de l’ascenseur s’ouvrirent alors et sans un regard vers la cardiologue, il recommença à pousser le brancard avant de devoir le laisser aux infirmiers de bloc. Il attrapa son calot dans la poche arrière de son pantalon et l’enfila rapidement avant d’entrer dans le sas de préparation où Teddy était déjà en train de se laver les mains. Se plaçant à côté d’elle pour laver les siennes, il se borna à fixer la salle d’opération à travers la vitre entre le sas et le bloc, sans se soucier encore une fois de la réaction de la cardiologue lorsqu’elle reconnaitrait le calot qu’il portait.

- Alors ? Tu es rentrée d’Irak depuis longtemps ?

Finit par demander le grand brun d’un ton neutre, le regard toujours posé sur le patient qui était en train d’être préparé. Il fallait bien briser la glace à un moment ou l’autre et en plus, le silence commençait à devenir pesant. Il avait donc finit par poser la question qui lui courrait dans la tête depuis qu’elle avait poussé la porte de la salle de trauma, quelques minutes auparavant.

Le regard toujours fixé sur le patient qui était en train d’être préparé pour l’opération, Lorenzo attendit la réponse de la cardiologue à côté de lui. Une réponse qui se faisait attendre il faut bien l’avouer. Ce n’est qu’au bout d’une dizaine de secondes que Teddy lui répondit enfin pour lui annoncer qu’elle était rentrée depuis deux ans déjà. A cette réponse, il faut bien l’avouer, la mâchoire se contracta, comme pour l’empêcher d’exploser. Non en fait, c’est chaque parcelle de muscle qui se mit à se contracter.

Il ne savait pas vraiment comment il devait réagir. Est-ce qu’il devait garder son calme, demander des explications, péter un câble, sortir du sas et envoyer un autre traumatologue sur ce patient, l’ignorer complètement ? Qu’est-ce qu’il devait faire bon sang ? Décidant de privilégier le patient à ses soucis personnels, l’italien décida de traiter son ex amante comme une inconnue durant l’opération et régler ses comptes plus tard. Il était en train de s’essuyer les mains quand la blonde commença à vouloir s’expliquer mais elle s’arrêta subitement. Elle venait sans doute de reconnaitre le calot que portait l’italien. Celui-ci tourna d’ailleurs le regard vers elle, un regard où l’on pouvait lire à la fois de la colère et de la déception.

- Pas la peine Ted’, j’ai compris.

Lança-t-il d’une voix parfaitement neutre, la rendant même sans doute blessante pour la cardiologue, avant de se diriger vers le bloc sans un regard de plus vers son ex amante. Avec l’aide des infirmières de bloc, il finit de se préparer et alla se placer à côté du patient sans un regard en arrière. A quoi bon de toute façon ? Si elle n’avait pas voulu le prévenir de son retour, c’est qu’il y avait une raison non ? Alors à quoi bon s’accrocher à quelque chose qui n’existe pas.

Prêt pour l’opération, Lorenzo donna encore quelques instructions au personnel l’entourant et demanda rapidement une scie à métal pour commencer par raccourci le javelot. Une fois cela fait, il commença à le retirer lentement tout en s’assurant de ne pas aggraver le cas du patient et de gérer l’hémorragie. Il savait Teddy face à lui, prête à intervenir au moindre problème et à prendre sa place une fois le poumon de l’homme libérer mais il ne lui adressa pas le moindre regard. Le reste de javelot à la main et complètement retiré de l’homme, Lorenzo s’écarta pour laisser sa place à la cardiologue et balança le morceau de métal dans la bassine prévue pour. Par respect pour le chirurgien plus que pour la personne à ce moment-là, il décida de rester jusqu’au bout de l’opération pour assister la blonde.